Comment savoir si vous êtes noir se présente comme un petit manuel relatant des anecdotes, sur un ton humoristique voire ironique. Le livre constitue un outil intergénérationnel, dans le sens où il est produit par deux sœurs d’origine angolo-congolaise, qui ont décidé de partager dans la sphère publique leurs histoires personnelles et familiales.
Ces histoires trouvent une résonnance culturelle chez d’autres personnes issues de l’immigration subsaharienne. Ces parcelles autobiographiques livrées avec humour démontrent que le livre Comment Savoir si vous êtes noir est un objet de dialogue et de partage intergénérationnel car c’est toute une jeunesse issue de l’immigration qui est amenée à se reconnaître dans ces lignes.
Comment savoir si l’on est noir ? A travers le jugement de valeurs des autres membres de la société ? A travers leurs regards ? Ou, prenons en nous conscience dans la sphère privée dont le quotidien est ponctué par des anecdotes du même type que celle relatées dans l’ouvrage ?
Les pages sur le réseau social Facebook VDN – pour Vie de Noir – ou encore Insta Video Vines French constituent aujourd’hui dans la même logique que Comment savoir si vous êtes noir, un espace de dialogue entre les générations , sur des thèmes propres à leurs doubles cultures.
Peut-on parler d’une universalité « noire » ? Une universalité qui s’appuierait sur les mœurs d’un monde de « l’Atlantique noir » décrit par Paul Gilroy?
Tout le monde déteste Chris – Everybody Hates Chris – est une série télévisée inspirée de l’enfance de l’acteur et humoriste Chris Rock, dans le Brooklyn des années 1980. Des scènes hilarantes de la série se retrouvent décrites dans l’ouvrage des deux sœurs, par exemple, à travers le thème de la punition correctionnelle. Ainsi, un parallèle entre les événements vécus par la communauté noire outre-Atlantique et la communauté noire dans la société française peut être établi.
Extrait de Everybody Hates Chris
Cependant, je juge le contenu de la page 142 non productif … Ce qui aurait pu être évité ! Certaines expressions type « Fatou flinguée » ou encore « Beyoncé Coulibaly », altèrent l’image de la jeune femme noire en France. Après avoir lu cette page, je me demande à qui est réellement destiné le livre ? Aux personnes issues de l’immigration subsaharienne ? Aux personnes établies en couples mixtes ? Le champ des destinations semble ouvert et accessible au plus grand nombre : le point fort du projet dû à la précision de l’objet d’étude.
L’ouvrage compose au même titre que les pages Facebook mentionnées plus haut, un espace créateur de lien social, au sein duquel se retrouvent des individus qui ont vécu les mêmes choses, vivant en France.
Comment Savoir si vous êtes noir m’a fait sourire et rire : je me suis reconnue dans ces pages, en lisant ces anecdotes, bien que je ne sois pas de la même origine que les auteures.
Dans le même esprit le livre de Gaston Kelman Je suis noir et je n’aime pas le manioc déjouait déjà en 2003 les idées reçues sur les Noirs dans la société française. Le relais est passé à une plus jeune génération qui souhaite s’inscrire dans cette même société française, fouillant dans les bagages de sa double culture.
Félicité Kindoki, Espérance Miezi, Comment savoir si vous êtes noir, Editions J’ai lu, 2014, 6 euros