Il ne s’agit pas du titre d’une chanson du groupe Metallica, ou encore d’une oeuvre sur papier de Philippe Parreno.
FADE TO BLACK est un événement annuel qui se tient en parallèle d’Art Basel Miami. 2015 signait la troisième édition de ce rendez-vous artistique qui réunir la crème de la crème de la scène afro-descendante. La communauté créative issue des cultures noires est célébrée à travers FADE TO BLACK qui s’inscrit très vite sur la cartographie de l’art contemporain aux Etats-Unis.
Artistes, plasticiens, musiciens, danseurs, directeurs et employés de musées, tous se sont donné rendez-vous le 5 décembre 2015, à Miami, à quelque pas de la Foire d’Art Basel. La journée s’est déroulée autour d’une exposition, d’une table ronde et d’un dj set.
FADE TO BLACK III, soirée © Philip Shung
Un souffle nouveau sur l’art contemporain aux Etats-Unis, déjà depuis la fin des années 1980 et le début des années 1990, avec les premières expositions personnelles d’artistes comme Lorna Simpson (à la Josh Baer Gallery, 1989) ou encore Glenn Ligon (Project Room: Glenn Ligon, Jack Tilton Gallery, New York, 1991). En effet, la tornade Basquiat change la donne et ouvre des portes aux différents artistes africain-américains, africains et latinos.
En 1999, sur l’initiative de Laurie Cumbo, aujourd’hui membre du Conseil municipal de New-York, un musée dédié aux arts des diasporas africaines, ouvrait ses portes à Brooklyn. Inspirée par le dynamisme économique apporté par le Guggenheim à la ville de Bilbao, Cumbo pense – à travers ses recherches universitaires – le MoCADA (Museum of Contemporary African Diaspora Arts) comme un moyen de développer une nouvelle économie culturelle et touristique, et ainsi de dynamiser l’aire géographique à l’échelle de Broolyn.
Or, bien avant le MoCADA, le Studio Museum of Harlem fut mis progressivement en place, en 1968 par un collectif composé d’artistes, d’activistes et de mécènes. Vingt ans plus tard, en 1987, le musée est reconnu par l’Alliance Américaine des Musées, devenant la première institution noire ou Latino à obtenir cette reconnaissance.
A travers ces exemples, nous pouvons constater que les artistes afro-descendants basés à New-York (et aux Etats-Unis) disposent de réseaux, de structures de résidences, de lieux d’expositions. Mais à l’heure où le glas de la mondialisation retentit dans le domaine de l’art contemporain, de quelles représentations bénéficient-ils sur la scène internationale ?
David Hammons, Julie Mehretu, Kehinde Wiley, Wangechi Mutu… Des noms d’artistes qui font difficilement écho jusqu’en France sauf celui de Wiley, qui représenté par la galerie parisienne Daniel Templon, « entre » sur le marché français dès 2012, avec des œuvres qui avoisinent les 100 000 euros*.
Kehinde Wiley à la galerie Daniel Templon
FADE TO BLACK III, soirée © Rod Deal
C’est dans le Pavillon Centrale des Giardini de la Biennale de Venise que je rencontrai Donnamarie Baptiste. « Art-Activiste » polyvalente, Baptiste est basée à New-York et œuvre dans le domaine artistique sous les différentes casquettes de directrice de marketing et de communication pour Creative Time, et de co-fondatrice et productrice de FADE TO BLACK.
FADE TO BLACK est l’occasion de fédérer cette communauté d’artistes et de l’inscrire dans une autre histoire de l’art, en marge du monde de l’art ; système que se plaît à décrire le commissaire d’expositions Okwui Enwezor.
Chronique TV#1
Donnamarie Baptiste et Dejha Carrington © Rod Deal
Retour sur la 3ème édition de FADE TO BLACK, à travers 3 questions posées à Donnamarie Baptiste.
african links : Donnamarie Baptiste pouvez-vous nous présenter FADE TO BLACK III le prochain événement que vous organisez en collaboration avec Dejha Carrington et le MoCADA. Quel a été le point de départ de l’aventure?
Donnamarie Baptiste : L’histoire de FADE TO BLACK commence en 2012. A Miami, durant les foires d’art qui ont lieu en décembre, les artistes et autres créatifs afro-descendants sont tiraillés tout au long de la semaine entre concevoir et voir des expositions, soutenir des amis, réseauter, vendre leurs oeuvres, ou encore rencontrer de nouveaux collectionneurs…
Nous souhaitions élaborer un événement divertissant, pour nous réunir tous ensemble, qui nous permettrait en fin de semaine de se rencontrer à nouveau et de faire la fête. Je voulais créer un moment à travers lequel nous nous réunirions. Ainsi, avec Dejha Carrington et Esther Park – qui avant d’être mes collaboratrices sont des amies – nous avons décidé de lancer un événement de ce type.
Nous avons sollicité James Bartlett, le directeur exécutif du MoCADA afin qu’il se joigne à nous : il fut très intéressé par l’idée ! Un ami a fait preuve d’une grande gentillesse et nous a prêté un espace ; puis nous avons approché certains talents de notre réseau, afin qu’ils se lancent dans l’aventure. Notre premier comité organisateur fut incroyable !
FADE TO BLACK I, 2012
african links : L’ événement se déroule en parallèle d’Art Basel Miami. Devons-nous voir FADE TO BLACK III comme un moyen de proposer différentes choses de la programmation de l’Art Basel? FADE TO BLACK III et Art Basel se complètent-ils mutuellement sur la scène artistique de Miami?
D.B. : Je pense qu’ils se complètent mutuellement. Un grand nombre de galeries engrangent d’importantes sommes d’argent en représentant des artistes de la diaspora africaine et des artistes de couleur. Il s’agit de nos amis, collègues et un grand nombre des membres de FADE TO BLACK. Nous devrions pouvoir être présents, s’exprimer et avoir un lieu, partout où nos artistes exposent leurs œuvres.
FADE TO BLACK III, soirée © Rod Deal
african links : A quel point est-il important d’élaborer un événement mettant l’accent sur les cultures noires en 2015, aux Etats-Unis?
D.B. : C’est extrêmement important. Aujourd’hui, je suis sûre que le monde entier a totalement conscience de ce qui peut encore arriver aux personnes noires et métissées aux États-Unis et certaines communautés raciales. En tant que personnes de couleur sont investies dans le monde de l’art, et vivant aux États-Unis, nous n’avons pas d’autres choix que de travailler à l’intersection de l’art et de la justice sociale. Nous croyons que les artistes ont un statut d’exception dans la société, et sont capables de pointer l’inégalité et l’iniquité, de manière à susciter, espérons-le, réflexion et action de la part des communautés au sens large.
FADE TO BLACK, Kehinde Wiley et le curator Tim Davis © Philip Shung
Propos recueillis et traduits par Virginie Ehonian
En +:
https://www.instagram.com/fadetoblackmiami/
http://www.donnamariebaptiste.com
http://www.dejhacarrington.com
Sources:
http://www.okayafrica.com/news/fade-to-black-art-basel-miami/
http://www.studiomuseum.org/about/about
http://mocada.org/about/mission-history/
*Le Journal des arts n°376, Tiré à part, du 5 au 18 octobre 2012, Léa Bismuth, « Galeries françaises: les barons »: Templon profite aussi de la Fiac pour « lancer » un jeune artiste jamais montré en France: l’Américain Kehinde Wiley. Mais il faudra approcher les 100 000 euros pour acquérir un portrait de ce jeune peintre (…)